Duke Ellington est l’un des plus grands
compositeurs américains, ayant écrit près de 2000 pièces. Grand pianiste et band leader, cela va de
soit que sa contribution au jazz est immense : son utilisation inventive
des « big bands », son éloquence et son incroyable charisme ont
apparemment élevé la perception du jazz en une forme artistique.
Ellington naît en 1899 à Washington et
commence dès l’âge de 7 ans à apprendre le piano. Sa mère, Daisy, lui apprend à
être élégant et fait en sorte que son fils soit entouré de nombreuses femmes
pour renforcer ses bonnes manières. Ses amis remarquent sa grâce naturelle et
son allure de jeune homme noble, lui valant rapidement le surnom de
« Duke ».
Durant l’été de 1914, il compose sa
première pièce, « Soda Fountain Rag », alors qu’il travaillait dans
un café. N’étant pas encore capable de lire ou d’écrire la musique, il retient
sa mélodie à l’oreille. Par la suite, Ellington commence à faire quelques
spectacles dans les clubs et cafés de Washington. Son attachement pour sa ville
natale est si fort qu’il refuse une bourse pour la prestigieuse Pratt Institute.
Éventuellement, il déménage à Harlem, devenant une figure du mouvement de la
Renaissance de Harlem.
La carrière de Ellington le mène à
devenir band leader. La particularité de ce band leader est qu’il dirigeait à
partir de son piano, utilisant des gestes et accords au piano pour conduire ses
musiciens. Reconnu pour son charme et son humour, Ellington était loin d’être
sévère, utilisant plutôt sa personnalité pour mettre de l’ordre.
Après avoir eu un grand succès dans les
années 30, Ellington perd en popularité. En 1956, il joue au Newport Jazz
Festival et donne une prestation qui passera à l’histoire. Imaginez la
scène : il est près de minuit, le claviériste est en retard. Ellington
prend la décision de commencer, malgré la soirée bien avancée. Il présente des
pièces de son répertoire oublié par le public, avec un interlude par le
saxophoniste Paul Gonsalves. L’interminable et épique solo de Gonsalves, l’énergie
de Ellington, la folie de la foule et les coups de minuit loin derrière ont
résulté en une performance comme jamais vue et entendue auparavant. La soirée a
fait la une des journaux internationaux, a eu droit à la première page du Time
Magazine, pour finalement être mis sur disque. Le vinyle en question demeure à
ce jour le meilleur vendeur de Ellington.
Puisque sa carrière a duré près de 6
décennies, Ellington a connu (et résisté) à plusieurs nouveaux genres de
musique : swing, bebop et R&B. Il a même dit du swing : « Le
jazz, c’est de la musique. Le swing, c’est de la business ». Il a aussi
son opinion sur le bebop, disant que ce genre est « comme jouer au
Scrabble sans les voyelles ». Finalement, dans un autre ordre d’idées, il
a aussi émis un commentaire sur la grande Peggy Lee, en mentionnant :
« Si je suis le Duke, Peggy Lee est la Reine ».
Ellington a connu plusieurs hits durant
sa carrière, comme « Mood Indigo », « It don’t mean a
thing », « Sophisticated Lady », « Solitude »,
« In a sentimental mood », « Caravan » et « Take the A
train ». Le pianiste fait le tour du monde, jouant partout sur la planète
jusqu’à sa mort, en 1974.
Musique
Côté
musique, il est évident que Duke Ellington a laissé sa marque. Voici quelques
manifestations actuelles de son héritage :
La
chanteuse Norah Jones a lancé en 2004 son 2ème album, Sunrise, contenant la pièce « Don’t
Miss You At All ». La chanson en question est adaptée de
« Melancholia » de Ellington, à laquelle Jones a ajouté des paroles.
Le résultat est une pièce simple, jazzée et…mélancolique.
Des
centaines d’albums et pièces ont rendu hommage à Ellington. Parmi les pièces
les plus connues, on dénote « The Duke » par Dave Brubeck, « He
loved him madly » par Miles Davis et « Sir Duke » par Stevie
Wonder ». Ella Fitzgerald, Thelonious Mok, Dizzy Gillespie, Tony Bennett,
Oscar Peterson et André Prévin sont d’autres quelques exemples de musiciens
ayant dédié des pièces aux légendaires pianistes.
Broadway
détient aussi un morceau de Duke Ellington dans sa culture, plus
particulièrement avec la comédie musicale Sophisticated
Ladies. Cette dernière est basée sur la musique de Ellington, qui avait
d’ailleurs une pièce intitulée « Sophisticated Ladies ». La comédie
musicale a été à l’affiche en 1981.
Cinéma
Duke
Ellington a contribué à plusieurs bandes sonores au cours de sa carrière, mais
a aussi fait quelques apparitions. Sa trame sonore la plus connue demeure Anatomy of a Murder, film dans lequel il
fait d’ailleurs une apparition. La musique du long-métrage est aujourd’hui
considérée comme une œuvre significative selon les historiens en cinéma. Selon
ces derniers, la musique, marqué par le jazz, évite les stéréotypes culturels,
contrairement à ce que se faisait avant. Dans le film, Ellington joue Pie-Eye,
le propriétaire d’un restoroute, où deux personnages ont une confrontation.
La
pièce « Caravan » fait aussi partie de la trame sonore du populaire
film Ocean’s Eleven. La pièce, jouée
par Arthur Lyman, peut être entendue lors que Rusty et Danny rencontrent Yen,
alors qu’il performe un numéro d’acrobatie dans un cirque.
La musique de Ellington a aussi joué dans d'autres films, notamment dans The Artist, The Notebook, Chocolat, The Matrix, The Big Lebowski, The Addams Family et plusieurs autres.
Finalement, Duke Ellington sera représenté au cinéma par nul autre que Morgan Freeman, dans le film The Jazz Ambassadors, à venir en 2013.
Littérature
Plusieurs
ont lu durant leurs années au secondaire le livre de Boris Vian, « L’écume
des jours ». À la lecture du roman, il devient évident que Duke Ellington
est fortement présent à travers les pages. D’abord, le personnage de Chloé a un
prénom inspiré par une chanson de Ellington, intitulé « Chloe (Song of the
Swamp) ». Swamp, voulant dire marais en français, réfère aussi à la
maladie qui afflige la personnage, c’est-à-dire un nénuphar au poumon.
Finalement, le jazz est présent à travers les pages ; Vian écrit
délibérément quelques mots avec la lettre Z (doublezons, zonzonner), faisant
référence aux deux z de « jazz ». Avec le film qui sortira en salles au printemps 2013, on peut espérer d'entendre beaucoup de Duke Ellington dans la trame sonore!
Duke
Ellington partage son amour pour la littérature avec ses albums, dont plusieurs
sont influencés par des romans. D’abord, Ellington a mis en musique le bouquin Sweet Thursday de John Steinbeck, avec
son album Suite Thursday.
L’album
Such Sweet Thunder, quant à lui, est
une suite de 12 parties inspirée par Othello
de William Shakespeare.
Bonne écoute!
Bel hommage à Duke Ellington. Saviez-vous que Ravi Shankar (décédé en décembre 2012) a "jammé" avec le Duke et Dizzy Gillespie dans les années cinquante à New York ? ( je ne crois pas qu'il existe d'enregistrement). Je vous dis ça parce que Nora Jones est une des filles de Shankar...
RépondreSupprimerhttp://www.thevillager.com/?p=3474
http://www.deccanherald.com/content/298349/norah-jones-says-father-ravi.html
;-)
Patrice Leroux
Je savais que Ravi Shankar et Norah Jones était père et fille, mais je n'étais pas au courant que Ellington et Shankar avaient déjà jammé ensemble. Cela fait plus de sens maintenant que sa fille s'inspire d'un ancien "collègue" de son père pour sa musique. Merci de l'info!
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